"Le Figaro:"
L'exercice physique devrait être prescrit sur ordonnance Mots clés : sport, activité physique, santé, maladies cardio-vasculaires Par Delphine Chayet - le 01/11/2012
C'est ce que propose l'Académie de médecine du fait des multiples bénéfices sur la santé du sport. Le sport sur ordonnance médicale, pris en charge par la Sécurité sociale, pour «réduire la consommation de médicaments des Français» ?
Alors que le ministère de la Santé doit mettre en œuvre dans les semaines à venir son plan en faveur de l'activité physique, l'Académie de médecine veut aller plus loin. «Le sport doit faire partie des prescriptions au cabinet médical, au même titre que les antibiotiques, l'aspirine ou les antidépresseurs», affirme le Dr Jacques Bazex, auteur d'un rapport sur ce thème rendu public cette semaine. L'idée d'une prise en charge de l'exercice physique par les pouvoirs publics, pour certaines catégories de la population, a d'ailleurs été déjà envisagée récemment, en particulier en Grande-Bretagne.
Depuis trente ans, une avalanche de publications ont démontré les bienfaits du sport sur la santé mentale et physique en général.
À court terme, l'activité a un effet bénéfique sur le sommeil, le stress, l'anxiété. Pratiquée régulièrement, elle allonge l'espérance de vie en bonne santé et retarde l'âge d'entrée dans la dépendance. Une étude prospective publiée en 2007, portant sur 250.000 personnes, montre ainsi qu'un sport d'intensité modérée, pratiqué au moins trois heures par semaine, réduit le risque de mortalité de l'ordre de 30 %. Selon l'Organisation mondiale de la Santé, la sédentarité serait responsable d'un décès sur dix dans le monde.
Oxygénation des tissus «En favorisant l'oxygénation des tissus, le sport améliore la fonction cardiovasculaire et pulmonaire, les muscles, le squelette, le système nerveux, le cerveau et les supports de l'immunité», rappelle le Dr Bazex.
Enfin, l'activité physique est un outil thérapeutique performant dans le traitement de certaines maladies chroniques.Comme l'a décrit une expertise collective de l'Inserm en 2008, un programme structuré d'activité physique réduit la pression artérielle chez les patients hypertendus et permet de différer, voire de rendre inutile, le traitement médicamenteux. Il facilite par ailleurs le sevrage tabagique et joue un rôle déterminant dans la prévention du diabète de type 2.
L'activité physique est également recommandée pour prévenir la survenue des maladies cardio-vasculaires et pour en limiter les conséquences. D'où l'idée avancée par l'Académie d'inclure le sport dans les prescriptions médicales, en tenant compte de la pathologie et de l'état du patient. «Sur l'ordonnance devra figurer le détail des activités physiques: nature du sport, intensité, durée et fréquence des séances, suivi et contrôles médicaux à observer», précise-t-elle, promettant que les dépenses engagées par l'Assurance-maladie seront rapidement compensées par une amélioration de l'état de santé des patients concernés. L'Imaps, une société liée à la Mutualité française, a calculé que la Sécurité sociale économiserait 56,2 millions d'euros par an en finançant à hauteur de 150 euros une activité physique ou sportive adaptée à 10 % des patients souffrant de cancer, de diabète ou d'insuffisance respiratoire chronique.
Favoriser l'activité physique des Français n'est cependant pas un mince défi. «Malgré les efforts déployés par certaines mairies, associations et bénévoles, seule une faible proportion de la population est concernée», note l'Académie. Dans une étude de l'Inpes, 42 % des personnes interrogées ont déclaré moins de dix minutes d'activité dans la semaine précédant l'enquête.
Comparant les habitudes des préadolescents européens et américains, une étude internationale a par ailleurs montré que la France fait partie des pays où la pratique est la plus faible à cet âge. «Il est de la responsabilité des pouvoirs publics de corriger cette situation alarmante», conclut l'Académie de médecine, qui appelle à la mise en œuvre d'un programme d'éducation pour enraciner le sport dans les habitudes de vie dès le plus jeune âge. Et sensibiliser les médecins à l'effet préventif et thérapeutique de l'activité physique.
Article du"Quotidien du Médecin"
Alors que le gouvernement a récemment annoncé la mise en œuvre prochaine d’une politique publique « Sport - Santé - Bien-être », l’Académie nationale de médecine appelle notamment à adopter « de nouvelles dispositions réglementaires » pour organiser la prise en charge du « sport santé » par l’assurance-maladie « dans le cadre de sa politique de prévention », « en association avec les mutuelles et les assurances privées ».
De nombreuses publications viennent aujourd’hui confirmer que pratiquer des activités physiques et sportives (APS) à tout âge « augmente l’espérance de vie en bonne santé », « retarde la dépendance », « constitue un complément thérapeutique efficace » pour de nombreuses affections, et améliore la prise en charge des handicaps, rappellent les auteurs*.
En dépit des efforts déployés par certaines mairies, associations et de nombreux bénévoles, le bilan de la France dans le domaine de la pratique des activités physiques et sportives reste décevant, constatent-ils.
Sport sur ordonnance Une « révolution culturelle » orchestrée par les pouvoirs publics est nécessaire pour enraciner le « sport santé » dans notre société. « Dès le jeune âge, puis tout au long de la vie, les activités physiques et sportives doivent s’imposer dans les habitudes de chacun ». Pour insuffler et soutenir cette dynamique, il convient de « sensibiliser les médecins et enseignants » aux bénéfices du « sport santé », le corps médical devant pour sa part « définir les bonnes pratiques de la prescription des APS dans des conférences de consensus », souligne l’Académie. « Les APS peuvent être proposées au sujet sain dans le cadre de la prévention primaire ou être l’objet d’une prescription médicale venant ou non compléter un traitement médical ». La prescription d’un sport sur ordonnance devra être rédigée « selon les règles de toute prescription médicamenteuse et être expliquée au patient avec la même rigueur » (nature et contexte de la pratique, intensité, durée et fréquence des séances, mesures associées, suivi et contrôles médicaux à observer).
Règle des « 3R »
Le volume d’activité nécessaire et suffisant pour chacun peut se résumer au respect de la règle des « 3R », à savoir :
« La surveillance médicale du sujet adoptant un programme d’activités physiques et sportives de base, peut se limiter à une consultation médicale annuelle programmée auprès du médecin traitant », avec des comptes rendus médicaux à faire figurer dans le dossier médical personnalisé (DMP), indiquent les auteurs. « Quand il s’agit de prescrire des APS dans un contexte médical, la collaboration des médecins référent, spécialiste de la pathologie à prendre en charge et du sport, devra être établie », poursuivent-ils. Quels que soient les cas, « la recommandation des APS ne se conçoit que chez des sujets respectant une hygiène de vie. Il serait inexact de croire que le suivi d’APS renforcées pourrait compenser une hygiène de vie trop laxiste », insiste l’Académie. › DAVID BILHAUT * Jacques Bazex, Pierre Pène, Danièle Rivière et Michel Salvador co-signent un texte intitulé « Les activités physiques et sportives : la santé, la société »